Extrait des Mémoires de Morgane B.
Nous étions dans une rue où toutes les maisons étaient habitées par des militaires étrangers. Dans l'une d'entre elles, il y avait une famille américaine qui possédait des chevaux. Ma maman avait bien sympathisé avec Regina, et moi-même avec sa fille Shelby, qui était à peine plus âgée que moi. De fil en aiguille, grâce à la confiance que Regina témoignait à maman, nous avons pu nous occuper de leurs chevaux.
J'ai donc eu l'opportunité et le bonheur immense d'avoir des cours particuliers d'équitation avec maman pendant un an. Je finissais l'école tous les jours à midi et nous allions passer les après-midi dans un ranch au beau milieu du Kansas et ses paysages à perte de vue. Nous avions une habitude, celle de passer auparavant chez Burger King m'acheter un milk-shake, tantôt à la fraise, tantôt à la vanille. Je préférais la vanille mais voulais toujours goûter à la fraise...
Il y avait donc cette jument blanche à laquelle je m'étais beaucoup attachée, Clémentine. C'est avec elle que j'ai appris tous les fondamentaux en équitation, fondamentaux qui me servent encore aujourd'hui et que je voudrais approfondir pour ma vie future, personnelle et professionnelle.
J'ai également appris des choses formidables, comme de bien tomber ou faire un petit parcours d'obstacles à crû, mais également que la bonne relation homme-cheval est la clé pour une expérience exceptionnelle.
J'y ai également découvert, à mes 13 ans, que le monde équestre, ou plus simplement le monde, est compliqué pour développer son talent. Je me souviens encore d'un concours de dressage dans ce même ranch, auquel ma copine Shelby avait participé en montant Ben, un vieux pur-sang arabe bien plus facile que Clémentine. Elle avait été jalouse lorsqu'elle avait su que sa maman m'avait proposé de participer au concours suivant sur Clémentine. En y repensant aujourd'hui, et grâce au fait d'avoir eu des chevaux à la maison, je comprends sa réaction car elle avait dû penser que j'empiétais trop sur son espace personnel.
A la suite de chaque séance, lors du retour en voiture à Fort Leavenworth, maman et moi faisions un débriefing afin de développer mon esprit d'analyse et préparer la séance suivante. Après le travail physique, le travail intellectuel !
Concrètement, maman était réellement MA coach, elle enseignait à son élève et non à sa fille. Cela m'a inculqué beaucoup d'exigence et un grand besoin de rigueur pour progresser. Je souhaitais ne pas décevoir ma coach, il ne s'agissait pas de ma maman dans ces circonstances.
Deux ans plus tard, lorsque nous avons eu nos propres chevaux une fois de retour en France, cela a été en quelque sorte la suite logique du travail que nous avions commencé au Kansas, mais de manière plus libre puisqu'ils nous appartenaient.